29 janvier, 2008

Achète le maxi t'auras le remix en bonus


X-Men "J'Attaque Du Mike" (1996)
Time Bomb Records
- Face A
1. X-Men - J'Attaque Du Mike (Version LP) (Prod : Black-Tom Cassidy)
2. X-Men - J'Attaque Du Mix (Version Remix) (Prod : Ke-C!)
3. X-Men - J'Attaque Du Mike (Instrumental)
- Face B
1. Diable Rouge - L'Homme Que L'On Nomme Diable Rouge (Version Originale) (Prod : Ke-C!)
2. Diable Rouge, Kassim, Kamal, Pit, Ziko, Booba, Ali, Cassidy, Hill-G & Hi-Fi - Time Bomb Explose... (Prod : DJ Mars)
3. Diable Rouge - L'Homme Que L'On Nomme Diable Rouge (Instrumental)
4. X-Men - J'Attaque Du Mix (Instrumental)

Time Bomb... Je suis un peu passé à coté à l'époque, la faute à ma banlieue qui était trop loin des émetteurs de certaines radios spé. J'arrivais pas à capter bien comme il fallait pour pouvoir écouter les freestyles radio de cette clique là même si quelques K7 tournaient à l'époque. Mais bon, on le savait tous : les X-Men, Oxmo Puccino, Lunatic, c'était mortel en freestyle.

A l'époque d'ailleurs, les X s'appelaient encore les X-Men et ils étaient trois : Hill-G (Gilles de son prénom, devenu Ill depuis), Cassidy et Hi-Fi (aujourd'hui en solo). En matière de freestyle, Ill était dans d'autres sphères, frôlant souvent l'abstraction mais avec tellement de style et de classe qu'on ne pouvait qu'en tomber accro... codile (j'ai pas pu m'en empêcher).
Et avec ce premier essai, c'est le carton plein. La quintessence du flow, une claque définitive pour tous les auditeurs de l'époque et la naissance d'une école dont l'influence commence seulement à faiblir aujourd'hui (à mon grand désespoir) : "textuellement parlant, le X-Men aime faire des enfants" comme le chante Cass' du "J'attaque Du Mic". Ill a toujours été cité comme référence en matière de flow par ses congénères mais Hi-Fi faisait également partie du haut du panier (ses maxis avec Leslie une fois parti en solo étaient de haute volée... j'ai un peu décroché quand il a signé chez 45 Scientific mais je crois que je décrochais du rap français tout court à cette époque). Cassidy, le pauvre, a toujours un peu souffert de la comparaison avec ses camarades mutants et j'ai toujours trouvé les gens un peu durs avec lui : je suis dingue de son couplet sur "L'invicible Armada" (faut que je vous en parle de celle-là aussi bordel)... "C'est Cassidy qui t'cause, finie la pause Kit Kat" raaaah ça me rendait dingue.

Seulement deux titres et le trio confirme tout le mal qu'il faisait à la concurrence. Sur une prod douce et enjouée, la mission des MCs estampillés du X qui consiste à attaquer le mic est plus que réussie. D'ailleurs, c'est marrant d'avoir choisi un titre aussi "agressif" alors qu'il est tout en mélodie et en technique (et j'ai presque envie de dire délicatesse). Et tout ça en parlant de leur réalité de lascar parisien, un exercice trop difficile pour les MCs en 2008 ?
"Donc voici Hill-G, strike une fois d'plus", ça attaque du mix après avoir plié le mic. Pas un remix, plus un part.2 minimaliste porté par l'alliance d'un gimmick de saxo discret et d'un beat dur et métronomique. Bien inspiré celui qui serait capable de dire quelle version l'emporte sur l'autre, du grand art dans les deux cas.

Forcément, "l''histoire" ne retient que les titres des X-Men mais chez moi, le titre de Diable Rouge a une saveur particulière. Encore une découverte partagée avec l'ami DJ Curtis : avant d'avoir ce maxi, on se passait en boucle le premier couplet de "L'homme que l'on nomme..." dispo sur la (finalement décevante) compile "Time Bomb". "En direct de Gy-cer... St Christophe pour ceux qui savent pas !". Pour les petits Conflanais que nous étions, Cergy, c'était "chez nous", ça représentait notre coin et c'était suffisamment rare à l'époque (et toujours aujourd'hui) pour qu'on en soit contents ! On découvrait le MC de LSO et même si son couplet n'était objectivement pas fantastique, on l'a bouffé en boucle : encore aujourd'hui je suis capable de le sortir d'une traite... La prod sombre et inquiétante, la voix grave de Trickpa, on s'est pété la nuque là dessus. Alors là, avec la version complète (on a été déstabilisé par les dédicaces légèrement différentes, c'est dire si on l'a saigné sur la compile), on est super guez.
A force de le saigner chez Loïc, il me le fallait ce maxi bordel... Donc mission Chatelet, direction LTD sa plage, ses cocotiers. Je sors de la boutique tout content avec mon sac plastique quand soudain, tatatin (comme la tarte), un renoi tout de rouge vêtu (jogging, béret mais pas baskets), un gros feuilles-deux au bec qui passe devant nous. Merde ! On mate la pochette du skeud (la version vinyle a une double cover : d'un coté, en bleu, les X-Men, de l'autre en rouge forcément, DR) : c'est bien lui ! Que faire ? Pas habitué pour un sou à accoster des rappeurs dans la rue à l'époque, encore moins pour leur demander de me signer mon vinyle et pas rassuré par mes 14 ou 15 printemps, j'hésite. Loïc lui se dégonfle complètement et tente de me décourager. Finalement, je me décide et c'est un Diable Rouge raide déchiré qui me signe super gentiment (et avec surprise) mon maxi. Un carnage d'ailleurs, le titre de son morceau devient, avec le marqueur (rouge) qu'il a réussi à trouver "L'homme que l'on nom". Je crois que Loïc est encore jaloux de ça aujourd'hui ahah ! Je suis content de ma pièce de collec' même si DR c'est pas les X-Men.

C'est quand même un des maxis les plus dingues du rap français ce 4 titres. Deux classiques (les titres des X) et la première et seule trace discographique officielle du crew Time Bomb au complet. "Time Bomb Explose". Prod minimaliste dans la lignée des "J'attaque..." sur laquelle se succèdent la crème du freestyle de l'époque : Diable Rouge, les Jedi Kassim et Kamal (futurs Ghett' Dip), Pit (pas encore Baccardi), Ziko (La Brigade), Ali et Booba (Lunatic). Rien que ça. A chaque fois que je réécoute ce titre, je me dis que l'apparition de Ziko est vraiment trop courte, la figure de proue des 12 brigadiers faisait vraiment partie du haut du panier à l'époque, un des mecs les plus sous-estimés...
"C'est les Lunatic connard écoute les bitchs crier / Booba + A.L.I. microphone premier / trier les bons sur Time Bomb / Les faux sont mis d'coté / C'est d'la bombe boy, 'peut pas boycotter" : Booba commençait les traumatismes. J'ai du rendre ma mère dingue à me remettre son couplet 20 fois de suite à fond dans ma chambre. N'empêche, ça m'amuse pas mal de voir les gens qui trouvent que Booba se perd, qu'il change de discours, etc... Merde les mecs, depuis "Tout Le Monde Dans La Ronde" (sur le maxi de remix de "Amoureux D'une Enigme" des Sages Po), celui qui n'était pas encore le Météore parlait de fric, de tass et de plier la concurrence avec toujours ce lien presque viscéral au bitume...
Bref, juste (encore) un petit classique. Trois sur la même galette, qui dit mieux ?

Bon alors après, oui, les X-Men ont perdu Hi-Fi, ont perdu le "Men" pour éviter les emmerdes avec Marvel et ont enregistré un "Jeunes, Coupables et Libres" assez décevant (tiens, d'ailleurs, ils l'avaient enregistré au Studio Bonzaï à Colombes à quelques mètres de là où j'ai passé mes 6 premières années, chez un ami de mes parents). Oui, Ill n'a plus jamais été aussi fort (alors que Cass' a gagné en puissance). Mais quand même, aussi décevante la suite de leur parcours a-t-elle pu être, je pense qu'il y a un paquet de MCs qui aimeraient avoir marqué le rap français comme ces trois là l'ont fait.

17 janvier, 2008

Perry Ellis, la saga continue...

Quand Octopus m'a proposé d'écrire avec lui pour le blog je me suis dit : pourquoi pas ? C'est l'occasion de se remémorer de bons vieux souvenirs. Et justement, après avoir écrit un billet (c'est comme ça qu'on dit en langage blogger non ?) sur la compilation "L432", j'ai repensé à ces fameuses Perry Ellis.




Vous vous souvenez de mon pote qui revenait des States avec? Il s'appelait Clément. Il était arrivé dans ma classe en 1997, c'était le "petit nouveau". Moi-même, ayant fait 4 collèges, j'étais pas très "ancien" non plus dans celui-ci. Deux ans j'y ai passé, mon record ! Quoiqu'il en soit, Clément était un vrai fils de riches, pas un fils de riches genre "putain ils ont une voiture neuve !", mais plus dans le style "putain ils ont 2 voitures neuves !!". Riche au point que son grand frère osait mélanger le Nutella à du Camembert dans ses sandwiches ! Quel gâchis… Mais on l'a vite fait entrer dans notre équipe car il était cool, du moins avant qu'il essaye de galocher ma zouz sous un tunnel ferroviaire pendant que je me faisais courser par les condés avec mon pote Momo (on reparlera de lui un jour). Encore une folle journée !


Quand on avait pas cours (ou pas envie d'y aller, "comme ma mère peut m'écouter pour toi je tchatche cool"), on allait chez lui pour se mettre à l'envers et faire nos histoires avec des zoulettes. Mais surtout pour y écouter du son. Il avait une chaine hi-fi INCROYABLE ! Quand on mettait le son à fond, les murs tremblaient. "Ma parole" comme disait Dan ! Quasiment tous les jours en sortant du bahut, c'était direction la FNAC. L'enculé, il avait un scooter (un vrai bolide pour l'époque, le célèbre Nitro) alors Tonio et moi on le rejoignait à pieds là-bas… Et un jour en écoute à une borne, y avait ce fameux CD d'Afro Jazz, "Afrocalypse". On avait déjà un peu entendu parler d'eux via la mix-tape de Cut Killer sortie en 95 (que j'ai mieux écouté par la suite) et leur maxi en 96, mais c'est grâce à "L432" qu'on a vraiment prêté attention à ce groupe.


Alors en voyant cette pochette légèrement surréaliste pour l'époque (wesh l'hélicoptère derrière), on s'est jeté dessus pour l'écouter. Seulement deux casques par borne, dégage Clément ! Ça a était très vite : 5 minutes d'écoute et 120 balles de plus dans les caisses de la FNAC ! 240 plutôt, Clément en avait prit un également.



Afro Jazz "Afrocalypse" (1997)
Island


  1. Intro
  2. Représente
  3. Afrocalypse
  4. La Téci
  5. Guerre Des Nerfs (Feat Suprême NTM & Lucien aka Papalu)
  6. Pénélope
  7. Sucker MC (Feat André "Doc"/Syd)
  8. Mystic (Feat Macka)
  9. Interlude
  10. Strickly Hip Hop (Feat Ol' Dirty Bastard du Wu-Tang Clan)
  11. Paria VS Etat (Feat Lucien aka Papalu)
  12. Pas Vu, Pas Pris
  13. You Can't Stop (Feat Big Red de Raggasonic)
  14. Glou-Glou Play
  15. Sacerdoce
  16. Phrasé
  17. Outro


Direction chez lui, en bus pour nous : nouvelles amendes, fausses adresses données aux contrôleurs (merci les cartes étudiantes bidons), en scooter pour l'autre privilégié. J'insère le CD dans sa putain de chaine et boum ! Nouvelle claque dans la ganache : "Représente". J'ai jamais vraiment été fan de NTM (qu'on retrouve ici en featuring sur le titre "Guerre des nerfs" avec Lucien alias MC Papalu), j'ai toujours trouvé Kool Shen un peu rincé (insultez moi j'adore ça !), mais faut bien dire que leurs "poulains" avaient prit le bon côté du groupe, le côté de Joey quoi ! D'ailleurs c'était surtout ses protégés à lui. Non pas qu'ils gueulaient dans le micro façon Jaguar Gorgone mais Daddy Jokno, Jaeyez et Robo avaient réussi à capter cette énergie.L'album sonnait super cainri pour l'époque, bien plus que leurs concurrents et c'était clairement revendiqué. Y a qu'à les voir sur la pochette, leur dégaine tout droit sortie de Brooklyn façon BCC : boots Fubu, baggys jeans, veste camouflage et blunts à la main. Un délire assumé jusqu'au bout puisque des producteurs américains de renoms (Da Beatminerz, Buckwild et Diamond D) côtoient les Français de la "
maison mère" : DJ Spank, DJ Clyde (ex-Assassin), DJ Max, Joey ou encore le "undergound hero", Daddy Jokno lui-même. Ne manquaient plus que les invités vedettes NTM, le déjanté du Wu-Tang Ol' Dirty Bastard (RIP) ou encore Big Red pour assurer correctement le buzz de cet opus.

Un casting de rêve en partie dû à une signature sur la major Island alors dirigée par le manager de NTM, Terror Seb. Sans doute la raison pour laquelle on les retrouvait sur "L432" sortie quelques temps auparavant sur le même label (merci Seb, qui au passage, plaça sa femme Lady Laistee ou encore Polo). C'était la minute mauvaise langue mais il est clair et net que les membres d'AJ ne manquaient pas de talent. Leur single avec le sale vieux bâtard de Brooklyn était monstrueux !
Je ne me rappelle plus si le clip avait commencé à être diffusé avant ou après la sortie de l'album mais je me souviens qu'il tournait pas mal sur M6 à l'époque. La nuit ok, mais quand même ! Merci Seb… Voilà que ça me reprend ! Tonio et moi, on passait nos nuits fonsdés à écouter nos vieilles K7 qui sautaient toujours au mauvais moment (pas les vôtres ?) et à mater des clips. Celui-ci nous faisait bien kiffer ! C'était pas à la même période que le one-hit wonder québécois KC LMNOP chantait "Ta yeule ! Vis tas vie pis reste en vie" ?


Mais là je m'égare et me rend compte que je n'ai pas vraiment parlé de l'album en lui-même… Bon il faut l'admettre, c'est loin d'être un classique au sens propre du terme. Néanmoins, il a quand même longtemps squatté mon lecteur.
Dix ou onze ans plus tard, je trouve qu'il a bien vieilli, bien mieux que certains de ses collègues. Le fait que l'album ait été enregistré sur NYC y est pour beaucoup je pense. On y ressent la crasse propre aux rues de la grosse pomme, mais version 77-93 ("

de Brooklyn, Aulnay à Melun"). Pas de concession ici, tout le monde en prend pour son grade : l'état, les salopes, les rappeurs en carton… Ça parle de prise de conscience de la jeunesse banlieusarde ou du réveil du peuple noir face à l'oppression. Une chose est sure : c'est ghetto !

Les MCs de l'hexagone ont toujours eu du mal à mélanger Hip-Hop et street : t'étais un scarla ou un zulu. Moi j'ai l'impression que les membres d'Afro Jazz étaient fiers d'être les deux même s'ils se considéraient "strictly Hip-Hop". Mais tout ça, Tonio et moi on s'en foutait, c'qu'on aimait c'était leurs flows qui se mariaient à la perfection et leurs 3 voix imposantes… A l'époque, les cordes vocales musclées c'était bonnard ! Les prods faisaient plaisir à entendre aussi, en pleine suprématie des violons et leurs copains pianos, sampler de la soul et du jazz était un parie risqué.


J'sais pas si l'album s'est bien vendu, en tout cas nous ce jour là, on en avait prit deux. Et tant pis s'il me manquait 100 balles pour une paire de Perry Ellis…